Les Philtres d'amour

Ambre s’était avancée avec les autres élèves  devant le bureau professoral. Elle observa les chaudrons qui y étaient posés par-dessus les têtes des élèves devant elle et écouta Ally les nommer, faisant ainsi gagner des points à Serdaigle. Elle était trop loin pour pouvoir étudier les potions en détail et n’en apercevait que la couleur. Lorsque les élèves retournèrent à leur place, Ambre hésita à s’approcher de la table pour sentir les effluves de l’Amortentia. Finalement, elle se ravisa et suivit le reste des élèves qui s’asseyaient sur les chaises de bois. Elle n’était pas sûre de vouloir connaître les odeurs qu’elle appréciait le plus au monde, en réalité.

La Directrice inscrivit alors les instructions au tableau, annonçant que les élèves devraient réaliser un philtre d’amour.

* Pas le choix, finalement… Mon odorat va être obligé d’y passer. *

Ambre lut rapidement le protocole et le mémorisa tout en sortant ses affaires de potions. Elle ramena ses cheveux noirs en une simple tresse et jeta un coup d’œil sur les ustensiles pour vérifier leur propreté. Puis, elle disposa les ingrédients nécessaires sur le côté de la table, s’aménageant de l’espace libre pour travailler. Ambre plaça son chaudron d’étain préalablement rempli d’un litre d’eau sur le feu et alluma celui-ci afin de porter le liquide à ébullition. Lorsque des bulles apparurent et éclatèrent à sa surface, annonçant que l’eau était suffisamment chaude, elle y ajouta une peau séchée de lézard, puis laissa tomber trois gouttes de son flacon de sang de crapaud. Elle s’empara ensuite de sa longue cuillère et remua trois fois dans le sens contraire des aiguilles d’une montre, puis deux fois dans le sens inverse avant de la retirer. Le mélange prit aussitôt une couleur bleu turquoise. Sans tarder, Ambre plaça dans son mortier six yeux de cloporte et cinq crochets de serpent qu’elle écrasa jusqu’à obtenir une poudre fine. Elle ajouta alors huit mesures de cette poudre dans son chaudron et baissa le feu jusqu’à arriver à un feu doux. Le mélange vira alors vers l’orange. Une fois que la couleur fut bien définie, Ambre ajouta un œuf de serpencendre dans le chaudron, puis deux yeux de cloporte. Elle coupa immédiatement le feu et jeta un coup d’œil à sa montre pour se repérer. Elle attendit alors que les dix-huit minutes passent, relisant la suite du protocole. Lorsque le temps fut écoulé, Ambre ralluma un feu fort et fit chauffer son chaudron. Elle y ajouta ensuite un œuf de serpencendre, puis deux yeux de cloporte et enfin un dernier œuf de serpencendre. Elle récupéra sa cuillère et remua deux fois dans le sens des aiguilles d’une montre avant de la retirer. Le mélange devint violet. Ambre coupa alors le feu et ajouta cinq mesures de poudre de corne de licorne dans le chaudron, ce qui eut pour effet sur la potion en préparation de la faire devenir rouge, comme prévu. La Serdaigle remua encore une fois dans le sens des aiguilles d’une montre à l’aide de sa cuillère et retira l’ustensile du chaudron pour finir. Une odeur intense envahit aussitôt ses narines, arrêtant le geste qu’elle avait amorcé pour ranger ses ingrédients. C’était une senteur forte et iodée, à la note de sel caractéristique, teintée d’un léger parfum de fleur. Ambre rassembla son matériel avec lenteur, tandis que l’image de sa demeure à Liverpool surgissait dans son esprit. Cette odeur-là, elle ne l’avait sentie qu’une seule fois, dans le jardin près de la mer de la maison, il y a plusieurs années, et elle était restée gravée à jamais dans sa mémoire. Bien sûr, lorsqu’elle retournait chez Zephyr, elle retrouvait cette senteur, mais elle n’avait plus jamais été pareille. Un sourire fugace étira les lèvres de la préfète tandis qu’elle se rappelait le jour où, encore enfant, elle était sortie un matin pour s’asseoir sur le sable et regarder les vagues, les arbres du jardin agités par le vent bruissant derrière elle. Elle avait été frappée par ce mélange de parfums, à la fois léger, sauvage et envoûtant.

Ambre termina de débarrasser sa table en attendant que la directrice finisse de vérifier les chaudrons des autres élèves. Les effluves qui s’échappaient de son chaudron avaient été extrêmement puissantes en ce qui concernait cette odeur-là, réussissant presque à l’immerger dans son souvenir. La jeune fille s’éclaircit l’esprit, tandis que son odorat distinguait une nouvelle odeur, celle de l’encre et du parchemin cette fois, rien de très étonnant. Mais lorsqu’une note métallique vint lui chatouiller les narines, Ambre fronça les sourcils. Ce n’était pas une senteur agréable, mais une partie d’elle-même était comme enivrée par ces effluves. La jeune fille identifia alors cette odeur si particulière. C’était celle du sang. Il était tout à fait légitime qu’elle apparaisse dans les vapeurs odorantes du philtre d’amour : Rien qu’à elle, elle pouvait constituer le moteur de l’Ombre. Les lèvres pincées, Ambre termina de ranger ses affaires et leva la main dès que le Directrice passa près d’elle après en avoir terminé avec Myosotis.