La rue principale du chemin de traverse

Une ambiance pesante régnait sur le chemin de traverse. L'air était chaud, le silence par moments trop présent. Et même les rayons du soleil n'arrivaient pas à cacher ça. Kalis le sentait, c'était instinctif. Les sourcils froncés, adossé contre un mur moite plongé dans l'ombre, il observait les passants qui défilaient devant lui ; qui lui jetaient quelques regards curieux mais sans jamais s'arrêter. Peu à peu, la rue principale se remplit. Mais il ne bougeait pas, restant immobile, soupirant de temps à autre. Le silence aussi apaisant qu'angoissant avait fini par disparaître. Dans la foule, au loin, il reconnut deux visages qu'il connait. Deux camarades de Poudlard ; et il les observa longuement. Ses yeux se perdirent soudainement dans la vague ... Jusqu'à ce qu'il apparaisse. Un homme encapuchonné, baguette à la main. Peu visible, mais les yeux de Kalis l'avaient tout de suite aperçut. Il redressa lentement la tête , le souffle court, le coeur battant à tout rompre. Mais dès qu'il fit un pas, un éclair vert jaillit et Victoria , qu'il avait tout de suite reconnut même de loin, s'écroula sur le sol. Les passants reculèrent ; l'homme à la capuche, que Kalis ne lâchait pas des yeux, disparut rapidement. Il était sûr qu'il le connaissait... Et la haine s'empara de lui rapidement. Une haine invisible aux yeux des autres , une haine cachée au plus profond de lui. Il aurait voulu la faire disparaître mais elle restait intacte. Le serpentard sentit une larme au coin de ses yeux qui disparut aussi vite qu'elle était venu. Les muscles douloureux, la mâchoire crispée, il s'avança à travers la foule, vers Dorea qui était auprès du corps de son amie. Pas la moindre émotion ne trahissait le visage de Kalis. Lui aussi voulait crier mais pas de tristesse ; de colère. S'agenouillant auprès de la serdaigle, il posa une main dans son dos. Une main tremblante mais douce. Le corps de la jeune fille était déjà pâle ; ses yeux étaient grands ouverts.

Il avança une main vers Victoria, l'effleura : sa peau était glacée. Plus de pouls. Plus rien. Ses dets grinçèrent, il pressa ses deux mains sur les épaules de Dorea. « Relève toi maintenant , c'est fini » Murmura t-il, la voix cassée. Kalis la força à se redresser, et à le regarder dans les yeux. « S'il te plaît, relève toi. Viens, on va rentrer » . Mais rentrer ou ? Ou devaient ils aller ? Les passants s'approchaient d'eux. Kalis aurait voulu leur dire de reculer, de se barrer. Parce que putain, ils avaient plus rien à faire ici. Mais aucun son ne sortit de sa bouche. Il secoua doucement Dorea pour la sortir de son cauchemar. Ses traits s'étaient durcis, ils devaient aussi savoir ce qu'ils allaient faire du corps. Mais ça... C'était surement pas à lui de s'en occuper. Kalis revoyait encore l'éclair vert. Le corps qui s'effondre. Il entendait encore les cris ; les pleurs. Ca risquerai de le hanter pour longtemps. « Viens Dorea » Murmura t-il de nouveau. Sa voix était presque suppliante. Il voulait au plus vite s'éloigner de la foule, du monde autour d'eux. Rejoindre le silence.

Il était l'heure de partir, j'attendais que William soit enfin prêt. J'avais mis ma cape sur mes épaules, même si je savais que dehors je finirai par l'enlever, il semblait faire chaud. Une grosse journée venait de se terminer, même si le soleil était encore haut. Les nouveaux élèves venaient chercher leur première baguette et cela avait été amusant. Je regardai à travers la vitrine quand j'aperçu Ria, une poufsouffle avec qui j'avais bien discuté une fois sur le monument de Leeloo.

Elle vivait avec les Potter, un peu comme leur fille adoptive. Elle était gentille. Elle se baladait avec Dorea. L'idée me vint d'aller leur dire bonjour, mais j'attendais Will. Un homme dont je ne vis pas le visage, encapuchonné, semblait tenter de se frayer un chemin, fixant un objectif. Je me sentis mal et je n'attendis pas William qui était presque à mes côtés. Je sortis en trombe, soudainement inquiète, comme un pressentiment.

Je courais presque derrière l'homme, mais j'étais trop loin. J'aperçu Kalis à ma droite près d'un mur qui semblait se lever. L'homme s'arrêta quelques secondes, une lumière verte, puis disparut. Je n'avais pas pu voir ce qu'il faisait, mais cet éclair vert, tout le monde le connaissait bien. Lorsqu'il transplana, j'aperçus une silhouette s'écrouler. C'est en voyant la personne qui se trouvait à côté que je compris. Victoria Lester venait de se faire tuer sous les yeux de Dorea.

J'étais encore trop loin. Dorea se mit à hurler, hurler et hurler encore. C'était déchirant et mes larmes se mirent à couler sans que je ne comprenne. Je courais à toutes jambes à présent, mais j'avais l'impression de ne pas approcher. Kalis s'était mis en route aussi, il était juste devant moi. Dorea se tut et s'accroupit auprès de son amie. Je courais toujours. Kalis s'approcha d'elle, et essaya de la relever. Je l'aidai, sans même qu'il ne s'en rende compte je crois.

Je m'agenouillai à mon tour à côté de la jeune fille. Ses yeux étaient encore brillants de larmes, on pouvait y lire la tristesse et la peur. Seigneur, comment peut-on faire cela à une jeune fille si gentille, elle n'a rien demandé! Je posai ma main sur sa joue, laissant mes larmes couler en silence. Dorea, derrière moi, ne pouvait pas me voir pleurer.

Je réfléchi à toute allure, les passants commençaient à paniquer, certains se mirent à crier, d'autres lançaient des "Oh mon Dieu!". J'avais envie de leur crier: "VOUS POUVIEZ PAS REAGIR BANDE D'IDIOTS?!" mais la raison l'emporta et j'ôtai ma cape afin d'en couvrir la jeune Poufsouffle, puis me tournant vers la direction d'où j'étais arrivée, je me mis à hurler:

- WILLIAAAAM!!!

Il était encore loin, il fallait qu'il fasse quelque chose, n'importe quoi, je ne savais pas, mais il le fallait.

Toujours à genoux à côté de Dorea, sans même regarder son visage, je tendis ma main droite vers elle, pris la sienne et la serra. Elle était la seule personne de connaissance, suffisamment près, pour partager ma douleur et montrer mon soutien à la fois. Après Kingsley, Victoria... Qui serait le prochain? Quel message cherchaient-ils à véhiculer? Qui était à l'abri?

Kalis soutenut Dorea contre lui presque à contre coeur. Il n'aimait pas beaucoup les contacts, surtout avec des inconnus mais celui ci était nécessaire. Il l'entendit prononcer son nom , mais ne répondit pas, les yeux fixés sur le corps de Victoria qui disparaissait sous la cape de l'élève qui les avait rejoins. La serdaigle accrochée à lui , il ne put pas voir le flash du reporter qui l'éblouit et jura à voix basse; avant de se tourner vers lui, le regard haineux. « Bordel, dégagez ! Déguerpissez moi le plancher ! » Les yeux durs et froids de Kalis dissuadèrent l'homme de les photographier de nouveau. Ses pensées se tournèrent de nouveau vers l'homme à la capuche qui venait de disparaître quelques instants plus tôt. Il serra les dents puis se tourna vers Dorea. « Dorea, il faut que tu me dises si tu te rappelles du visage de l'homme. Tu as pu le voir ? Il avait une capuche non ? » Murmura t-il , la mâchoire serrée , sans la quitter des yeux. Il aperçut un autre petit penché au-dessus du corps de la jeune fille, qui avait l'air de la connaître tout aussi bien que Dorea. De sa main libre, il la posa sur son épaule, la pressa fortement. Assez douloureusement et assez fort pour l'obliger à se remettre sur ses deux pieds. « Ca vaut aussi pour toi petit, tu devrais partir. Viens. » Sa voix était toujours aussi froide, ne trahissant aucune émotion. En même temps , il mit délicatement une main derrière la tête de la serdaigle et la posa contre son torse en prenant bien soin de la cacher des projecteurs.

Kalis l'obligea à reculer , à partir loin d'ici, à s'éloigner. Avant de partir, il se tourna vers la gryffondor toujours près d'eux : « Il faut qu'on éloigne les gens, qu'on appelle quelqu'un. Tu sais qui appeler ? » Toujours aussi calme, il planta ses yeux dans ceux d'Alice. Elle aussi paraissait bouleversée mais pas autant que les autres. « Je sais que c'est dur mais je vais avoir besoin de toi pour calmer les gens.. pour calmer ton amie aussi. Je peux te faire confiance ? » mais qu'est ce qui lui prenait de vouloir jouer au baby sitter tout à coup ?

J'étais littéralement effondrée, mais une voix me ramena à la réalité. Kalis, qui semblait ressentir plus de haine que de tristesse, s'adressait à moi, me demandant de l'aider à gérer la foule d'une manière ou d'une autre. William n'arrivait pas à nous rejoindre tant la foule était dense. Il y avait eu un premier flash auquel je n'avais pas réagi, choquée par la scène. Kalis avait raison, je devais me montrer forte, j'étais préfète à Poudlard ce n'était pas pour rien.

Je me redressai, ne lâchant pas des yeux Ria allongée là, devant moi, ma cape en guise de couverture comme si elle risquait d'avoir froid. Kalis s'éloignait. Souhaitait-il que je l'aide à remettre de l'ordre? Ou souhaitait-il que je le fasse à sa place? Peu importe, il fallait le faire.

Me retournant, je poussai quelques personnes, leur intimant gentiment de reculer, de laisser de l'espace, puis un second flash m'éblouit. Un journaliste était là, devant moi, ma colère explosa. Laissant couler mes larmes sans la moindre retenue je me mis à lui hurler dessus:

- Vous devriez avoir honte! Vous n'avez donc aucun respect pour les gens? Dégagez sale pourriture!

Je me mis à pousser avec plus de ferveur les badauds s’agglutinant autour de nous. Un petit garçon, qui était arrivé juste après moi, pleurait à chaudes larmes. Séchant les miennes, je m'approchai de lui et le relevai. Je glissai ma cape jusque sur le visage de la jeune victime, en faisant face au garçon (John) et lui expliqua mon geste:

- Il ne faut pas qu'on laisse ces dingues prendre des photos d'elle comme ça. Tu es de sa famille?

La foule s'était un peu dispersée, le corps caché, c'était moins "intéressant", quelle bande de vautour! Je pris l'enfant par les épaules. William semblait se rapprocher enfin.

[Prenez en compte que le corps est dorénavant couvert d'une cape, et la coupe d'Europe est passée]